Sélectionner une page

On perçoit l’obésité comme un manque de contrôle de soi, comme de la paresse, comme une maladie, comme la cause de plusieurs maladie et quand on le vit de l’intérieur, comme une prison…

En fait l’obésité est sournoise. Il y a celle qui t’attaque dès l’enfance et celle qui arrive tranquillement et s’installe aux fil des diverses épreuves de la vie.

J’ai fait partie de la première catégorie. Quand je regarde mes photos scolaire, jeune enfant, je n’avais pas de surpoids notable. Par contre, vers le milieu de mon primaire, ça a commencé à se gâcher. Vers 7-8-9 ans, l’enfant que j’étais ne savais pas que manger le Nutella à la cuiller ou prendre des gorgées de sirop au chocolat pouvais être néfaste… parce que c’était si bon. C’était si bon après une journée à l’école à me faire intimider. C’était si bon le matin pendant Bouledogue Bazar la fin de semaine. Un peu plus tard, c’était si bon pendant ma période de solitude les soirs de semaine avant que ma mère monte faire le souper. Ça ne s’est pas amélioré au secondaire, même en étant dans un collège privé, le sucre et le chocolat était comme un baume sur l’intimidation que je vivais pendant les période de classe. Il n’y avait personne pour me guider vers des ressources moins néfaste que cette dépendance au sucre. C’est devenu une cercle vicieux. Mon poids augmentais, donc je me sentais de plus en plus mal, donc je mangeais de plus en plus de sucre… et ainsi de suite.

Un jour, on se réveille adulte avec déjà ce fardeau à trainer. Mais quoi faire d’autre que de l’accepter, anyway? Il faisait parti de moi et avait toujours été là. J’avais appris que les régimes ne fonctionnais pas. Je n’avais jamais voulu en faire. Pourquoi perdre 70lbs pour en reprendre 90 par la suite? Non merci, je préférais rester stable dans mon surpoids que d’engraisser à coup de 20lbs. Un bon matin j’ai décidé que j’étais tanné. Je rêvais d’être mince. J’ai changé bout pour bout mon alimentation et j’ai fait du vélo à coup de 2h par jour. J’avais réussis à perdre 20lbs en environ 2 mois. J’ai dû tout arrêter à cause d’un projet de rénovation qui s’est étiré sur plusieurs mois. Ma motivation était disparue. Ensuite, la vie continue, les grossesses nous font engraisser. Ce poids que je n’ai jamais réussis reperdre. J’avais perdu le contrôle. Suite à la deuxième grossesse, la douleur s’est installé et n’est jamais repartie, j’avais du mal à bouger. J’étais malheureuse. J’avais l’impression de constamment porter un manteau de 50lbs, si ce n’est pas plus, que je ne pouvais pas enlever. La sensation de ne pas toucher le vrai moi, mais la couche de graisse par dessus. C’est une sensation difficile à décrire; le manteau reste la meilleure image. J’avais mal, je me sentais mal. C’était horrible. Il n’y avait plus rien de réconfortant à part la nourriture. Un petit peu de “bonheur” dans cet enfer quotidien. Un petit bout de bonheur malsain. Comme les junkies. Je vivais l’enfer en attendant la prochaine dose. Certes mes enfants m’apportaient du bonheur, mais le profond mal-être subsistait. Se sertir quotidiennement comme une merde. Se sentir prisonnier de son propre corps… L’obésité nous ravage l’esprit.

Je crois que ceux qui ne l’ont pas vécu peuvent difficilement s’imaginer l’ampleur du problème. C’est un cercle vicieux qui devient de plus en plus gros. On tombe dans un engrenage malsain dans lequel il est très difficile de se sortir. Les médecin nous disent à gauche et à droite de perdre du poids, mais ne nous disent pas comment se sortir de l’engrenage. On arrive à perdre quelques livres, mais les chaines qui nous attachent à l’engrenage sont solides… on fini par presque tout le temps retomber dans nos vieux patterns faute de soutien. Notre motivation est aussi mal faite des fois… elle peut arriver rapidement et s’estomper aussi vite si on ne l’alimente pas ou si les résultats ne sont pas apparents assez rapidement. Ensuite les médecins continuent de nous blâmer parce que nous avons pris encore du poids. Les discours moralisateurs n’aident en rien à se sentir mieux… Le poids continue de s’accumuler. Après, le problème ce n’est pas que la douleur, mais certains problèmes de santé se mettent de la partie. Qui n’a pas entendu parler: “L’obésité est le facteur de risque principal du diabète et d’autre maladies chroniques…”; “L’obésité et l’apnée du sommeil…”; “l’obésité et le risque d’accidents cardio-vasculaires ou de maladies cardiaques”; “l’obésité augmente les chances d’avoir des le SOPK et d’être infertile”… et j’en passe. Et puis rendu là… On est si bas qu’on se sait plus quoi faire pour changer… On voudrais changer mais on se sais pas par quoi commencer. On se sent tellement impuissant. L’obésité nous ravage la santé.

Ma chirurgie m’a permis de briser ces chaines. Je suis enfin heureuse de m’être débarrassée de ce manteau permanent. Je peux enfin gouter la vraie vie. Celle ou mon corps me permet d’accomplir plein de choses, d’aller plus haut et plus loin, d’aller plus vite et d’être plus forte. Je n’avais jamais connu ce sentiment, et je me surprends souvent d’être capable de faire certaines choses que je n’aurais jamais pu imaginer.

J’ai pris gout au CrossFit. C’est intense comme entrainement, mais justement, c’est ce que j’ai besoin. Ma façon de voir les choses peut parfois être contradictoire. J’ai peur du changement, mais en même temps je l’aime. Mais pour oser faire un changement, je dois être prête. Ce qui parfois… peut être long. Mais quand je décide d’embarquer dans le bateau ce n’est pas pour en débarquer. J’avais peur de la chirurgie… mais en même temps je savais que c’était la bouée qui me restait avant de sombrer dans le fond de mon baril du désespoir. J’ai perdu assez de poids pour reprendre confiance en moi. Et j’ai maintenant assez confiance en moi pour aller me dépasser au CrossFit.

Quand je parle au monde d’où je suis partie, je vois souvent le questionnement dans leur yeux, leur questionnement à propos de mon histoire. Le pourquoi du comment. Et un peu l’admiration d’avoir réussis à accomplir ce parcours. D’avoir réussis à perdre presque 90lbs (88 pour être exacte). Mais on dirais que je ne le vois pas du même oeil. Oui je suis fière de moi, fière d’avoir réussis à perdre tout ce poids, mais en même temps on dirais que j’ai trouvé ça trop “facile”. Je me suis adaptée trop facilement aux nouvelles routines. Je n’ai pas trouvé ça assez difficile. Pour cette raison j’ai peur de retomber. Je ne veux pas retourner d’où je viens. Je crois que j’arrive à trouver cette sensation de travailler fort, de devoir le mériter avec le CrossFit.

Quelqu’un ma dit sur internet cette semaine qu’il aimerait un jour se mesurer à moi dans une compétition sportive. Mais pourquoi? Je comprends que j’inspire peut-être la fascination ou l’admiration, mais de là à vouloir se mesurer à moi? Je pars de tellement loin. Je n’ai pas l’envie de me mesurer à qui que ce soit. Ça ne va que me générer que de la déception. Je n’arrive même pas encore à courir un 5km d’une traite, ou faire un push-up régulier, clairement je ne suis pas encore rendue à faire un marathon… Le seul défi que je veux réellement surmonter est de refaire un dead-end race. Je l’avais fait à 220lbs, j’ai hâte de voir ce que je suis maintenant capable de faire.

La chose que je trouve plus difficile à accepter avec la perte de poids est les ravage que l’obésité à laissé sur mon corps. La peau en trop, les seins complètement vides, les fesses et les cuisses qui ballotent comme un jell-o. Certaines personnes ont la chance d’avoir eut une peau assez élastique, malheureusement ce n’est pas mon cas. Même avec un perte de “seulement” 88 lbs (considérant que mon poids lors de l’acceptation à la chirurgie était de 228lbs) j’ai de la peau en trop. C’est difficile à accepter. Mes seins sont complètement vides. Je n’aime pas l’idée des implants. Je ne suis pas le type de fille à vouloir de gros seins, même que mon B rempli de peau en trop me conviens très bien… sauf quand j’enlève ma brassière. Sans parler de la peau de mon ventre qui pends lorsque je n’ai pas de vêtements pour la retenir… Plus je maigris plus cette peau me dérange. Au niveau esthétique oui, bien sur, mais aussi physiquement. Ça tire… et certains endroits sont plus sensibles que d’autres, notamment les aines et juste au dessus du pubis. Ca ne fait que tirer. Je n’ai pas développé de champignons, et je serais surprise puisque je n’ai pas de repli très intense. C’est surtout frippé. Frippé comme un vieux raisin sec déshydraté. C’est là clairement pour me rappeler d’où je suis partie. L’obésité m’a ravagé la peau.

Mais pourquoi je suis allée jusque là? À mes grossesses j’ai même monté jusqu’à près de 250lbs. J’en pèse aujourd’hui 140. Je n’arrive pas à croire que j’ai pu supporter ce poids si longtemps. Bon ok, j’étais enceinte, c’était temporaire, parce que je suis redescendue à 230 par la suite, mais reste que c’était un poids tout simplement énorme à trainer. Même à 230lbs c’était énorme. Comment j’ai pu me rendre là? Non en fait c’est facile se rendre là. Simplement se laisser aller, perdre le contrôle et ne pas le reprendre. Retomber dans de mauvaises habitudes et ne pas vouloir en ressortir. La pensée magique. Ça n’arrive qu’aux autres. Tomber dans la nourriture pour combler un mal-être. Fouiller dans le frigo par ennui, par contrariété. Se récompenser avec un chocolat. C’est un combat quotidien.

Le CrossFit m’aide à rester focus sur qui je veux être. Je ne veux pas retourner en arrière. Je veux être une meilleure version de moi-même. Peau en trop ou non, ce n’est pas elle qui va m’empêcher de réaliser mes nouveaux objectifs. Je ne laisserai pas les ravages de l’obésité prendre le dessus sur moi.